Le livre de François Bernier offre à la France de l'époque un miroir pour mieux se comprendre (expert)

2024-01-30 10:28:34 Source: French.xinhuanet.com

Photo d'archive des livres en français sur le confucianisme à la librairie Le Phénix à Paris en mars 2019. (Xinhua/Yang Zhigang)

Le livre de François Bernier va bien au-delà d'une simple traduction, car il offre à la France de l'époque un miroir pour mieux se comprendre. Il présente plutôt Confucius comme le fondateur de la science des princes. Pour lui, les textes confucéens traitent d'abord de l'art de la politique et il s'intéresse à ces textes parce qu'il y voit un enseignement pratique et efficace pour les souverains.

BEIJING/PARIS, 28 janvier (Xinhua) -- Le 27 janvier, les chefs d'Etat de Chine et de France ont échangé leurs félicitations à l'occasion du 60e anniversaire de l'établissement des relations diplomatiques entre les deux pays. Les échanges culturels entre ces deux nations ne se limitent pas seulement à ces 60 dernières années, mais remontent en réalité à plusieurs siècles.

En 1688, "Confucius ou la science des princes", la première traduction dans la langue de Molière de l'ouvrage en latin "Confucius sinarum philosophus", est assurée à Paris par François Bernier. Cet ouvrage avait été édité et publié l'année précédente par l'un des jésuites envoyé en Chine, le Belge Philippe Couplet (1622-1693), englobant systématiquement des œuvres classiques de l'école confucéenne dans l'histoire européenne.

Un exemplaire des manuscrits de M. Bernier a été offert en 2019 par le président français Emmanuel Macron à son homologue chinois Xi Jinping lors de sa visite d'Etat en France. Ce cadeau précieux a attiré l'attention de tous, incitant les experts à mettre en lumière les échanges culturels entre les deux pays au cours des XVIIe et XVIIIe siècles, qui constituent les bases solides des relations de nos jours.

CONFUCIUS OFFRE A LA FRANCE UN MIROIR POUR MIEUX SE COMPRENDRE

Après la publication en 1687 du "Confucius sinarum philosophus" par la Bibliothèque Royale (aujourd'hui la BNF), M. Bernier a tout de suite compris l'importance d'une traduction en langue française pour toucher un plus grand public et cela correspond à son idée que la diffusion du confucianisme en France peut aider la culture française à dépasser la crise morale du scepticisme et à refonder la politique sur les vertus, rappelle Thierry Meynard, professeur français de philosophie à l'Université Zhongshan (Université Sun Yat-sen), basée à Guangzhou (sud).

M. Bernier a choisi de se concentrer sur l'esprit des textes et n'a donc pas le même intérêt que les jésuites pour l'histoire. Ce n'est pas tant l'histoire qui l'intéresse, mais le message même de Confucius. Il omet ainsi l'immense majorité des notes historiques composées par les jésuites. Il présente une traduction plus épurée qui exprime l'essentiel, selon M. Meynard, qui a assuré la traduction en chinois de "Confucius sinarum philosophus" et fourni sa contribution de sinologue à l'édition moderne de "Confucius ou la science des princes" de Sylvie Taussig en 2015.

Le livre de François Bernier va bien au-delà d'une simple traduction, car il offre à la France de l'époque un miroir pour mieux se comprendre. Il présente plutôt Confucius comme le fondateur de la science des princes. Pour lui, les textes confucéens traitent d'abord de l'art de la politique et il s'intéresse à ces textes parce qu'il y voit un enseignement pratique et efficace pour les souverains. En destinant l'ouvrage aux rois ou aux futurs rois, M. Bernier accorde une attention particulière à l'éducation morale du souverain, y voyant le fondement politique de la nation.

Selon Thierry Meynard, au-delà de la particularité de la Chine, M. Bernier veut se saisir de principes qui peuvent contribuer à la fondation d'une science politique moderne. L'enseignement confucéen est une science certes établie et transmise par les anciens princes et souverains chinois, mais qui est adressée en 1688 à tous les souverains du monde, et plus particulièrement à Louis XIV, pour favoriser l'harmonie entre le monarque et le peuple.

Rédigé par: Wang Siyang