Avoir placé les Routes de la soie en Wallonie est une source d'opportunités (expert belge)

2019-10-09 16:44:39 Source: French.xinhuanet.com

L'inspecteur général à l'Agence wallonne à l'exportation et aux investissements étrangers (AWEX), Michel Kempeneers, a fait paraître mardi dans le quotidien belge "Le Soir" une tribune sur les relations avec la Chine. Vous pouvez retrouver ci-dessous ce texte dans son intégralité :

Pour faire des affaires en Chine, il est important de devenir ami avec son partenaire. Et plus l'amitié est longue, mieux c'est.

La Wallonie a une longue histoire de relations amicales et fructueuses avec la Chine. Déjà, de 1898 à 1905, l'ingénieur et industriel wallon Jean Jadot a construit le chemin de fer Pékin-Hankou qui présentait, pour traverser le fleuve Jaune, le premier pont ferroviaire métallique de Chine, long de trois kilomètres. Un pont symboliquement prémonitoire pour les futures relations entre la Wallonie et la province du Hubei!

Quand, dans les années 1980, les industriels wallons revinrent en Chine après l'ouverture décidée par Deng Xiaoping, ils trouvèrent parfois du matériel ACEC d'avant-guerre fonctionnant encore.

Cette riche relation ne fut pas à sens unique. Une grande héroïne de la résistance en Wallonie fut Qian Xiuling, mieux connue chez nous sous le nom de Madame de Perlinghi, qui, en juin 1944, sauva d'une mort certaine 97 otages d'Ecaussinnes.

Mais venons-en aux relations économiques qui se construisent aujourd'hui sur ce passé d'amitié et de coopération. Un des grands projets du XXIe siècle est assurément la Belt and Road Initiative, parfois appelée en français les Nouvelles Routes de la soie.

Concernant ce projet, la Belgique n'a pas encore signé d'accord avec la Chine, ce qui n'empêche nullement la Wallonie d'aller de l'avant. Celle-ci développe en effet depuis longtemps une politique active d'accueil des investissements chinois, de compréhension multiculturelle et de coopération économique. Elle joue en outre un rôle crucial de carrefour de biens, de marchandises, de personnes et... de big data au coeur de l'Europe des consommateurs, niché au centre du triangle Amsterdam-Paris-Francfort, à deux heures de Londres. Une situation de veille et de marché-test idéale entourée des grands pays européens.

L'AWEX a, en 2009, inauguré un China Welcome Office à Mons et en 2010 son alter ego en Chine, le Belgian Welcome Office à Wuhan, pour aider les entreprises à aborder ces marchés respectifs et favoriser les échanges scientifiques et technologiques.

L'AWEX travaille à ce renforcement avec le réseau des parcs scientifiques wallons SPoW, dont le parc scientifique de Louvain-la-Neuve est membre. La politique du président chinois actuel Xi Jinping, "One Belt, One Road" visant à promouvoir les échanges inter-civilisations, poursuit ce même objectif de renforcement.

Le résultat concret de cette politique est la création du CBTC (China-Belgium Technology Center), un incubateur chinois dans le parc scientifique de Louvain-la-Neuve. Ce projet, initié en 2009, vise l'incubation croisée au service des entreprises chinoises et européennes.

Le CBTC favorisera les accords scientifiques, technologiques et d'affaires entre les entreprises chinoises et les laboratoires, centres de recherche et entreprises belges et ouvrira le marché chinois aux entreprises européennes. Un complexe de 82.700 m² est en cours de construction (fin de la première phase prévue début 2021) avec un incubateur général, des bureaux, un centre de services (séminaires, restauration, etc.) ainsi qu'un hôtel de 170 chambres. Il y a potentiellement la création d'au moins 1.500 emplois, dont 600 expatriés chinois.

Aujourd'hui, ce travail de mise en réseau de parcs scientifiques et technologiques a concrétisé des liens avec une douzaine de parcs scientifiques chinois, autant de têtes de pont public/privé pour la Wallonie en Chine, coordonnés par les six bureaux chinois de l'AWEX à Beijing, Shanghai, Guangzhou, Wuhan, Hong Kong et Shenzhen, ainsi qu'à Taipeh.

De nouvelles relations offrent également de nouvelles perspectives de coopération avec certaines zones économiques particulières, comme les aéroports cargo de Zhengzhou et Chongqing, la province de Hainan et le pôle aéronautique de Tianjin. Une action spécifique des autorités wallonnes se glisse également dans la vision globale et unique de la Greater Bay Area comme un ensemble cohérent qui s'enrichit de sa diversité, avec une attention particulière sur le secteur digital, l'industrie 4.0 et l'e-commerce.

La Chine a besoin en Europe de points de chute fiables et solides pour échanger les produits, mais également encourager le partage des connaissances et supporter les défis de l'économie digitale. Et ce n'est pas une nouveauté : la mythique Route de la soie - utilisée depuis l'Antiquité jusqu'au XVe siècle - fut déjà un lien économique et culturel fondamental entre la Chine et l'Europe.

Le commerce électronique a remplacé les chameaux mais, c'est une certitude, la Chine reprend sa place de leader commercial mondial qu'elle détenait jusqu'au milieu du XVIIIe siècle. Alibaba, le No1 chinois de l'e-commerce, a choisi l'aéroport de Liège pour y installer son hub européen, au même titre que les hubs internationaux de Moscou, Dubaï, Kuala Lumpur ou Hong Kong. Bien sûr, la position géographique favorable a joué son rôle, mais pas seulement...

Les divers avantages qu'offre la Wallonie en matière de flexibilité logistique ont été déterminants. Après plusieurs vols hebdomadaires opérés par Sinotrans et le lancement de la première ligne fret de blocktrains entre Zhengzhou et Liège Airport (sur la plateforme multimodale) le 2 mars 2019, la "Cainiao Line", première ligne de fret ferroviaire de commerce électronique transfrontalier, quittait le terminal de Zhengzhou en Chine en direction de Liège.

Les PME wallonnes et européennes pourront désormais utiliser la voie ferroviaire pour vendre leurs produits en Chine. Dans le cadre des routes de la soie "digitales", ces développements cadrent parfaitement avec le programme eWTP (Electronic World Trade Platform) - permettant de mettre en liaison un maximum de PME et d'indépendants du monde entier, court-circuitant les nuisances environnementales de l'action des multinationales intermédiaires de distribution, en privilégiant le B2C de porte à porte. C'est une excellente nouvelle pour la Wallonie, terre de PME par excellence.

Avoir placé les Routes de la soie en Wallonie est une source d'opportunités pour le processus de reconversion économique de la région, mais également une grande responsabilité d'être à la hauteur de défis désormais planétaires!

Rédigé par: Li Qiaoling